
Pour devenir le boss des télécoms et le parrain de la « startup nation » avec son incubateur géant, Xavier Niel n'a jamais hésité à bidouiller les technologies (et les lois). Le secret de son succès ? Avoir su emprunter les chemins de traverse...
La curiosité est un excellent défaut. Bambin déjà, Xavier Niel est avide d’infos. Et si un mur se mettait en travers de sa route, il devait le percer. Littéralement : à 4 ans, à l’aide d’une cuillère ou d’un tournevis, il creuse pendant plusieurs nuits un trou aussi grand qu’une balle de tennis dans la cloison qui séparait sa chambre du salon. « Il voulait sans doute savoir ce que nous faisions de l’autre côté », suppose son père Michel dans la biographie du patron de Free, La voix du pirate. Première leçon : pour avoir un coup d’avance, vous devez accéder à l’info le premier.
Restez connecté, par tous les moyens. A 18 ans, Xavier ne s’est pas assagi. Afin de pouvoir papoter à la terre entière en toute tranquillité, il tire en loucedé une ligne téléphonique du salon à sa chambre. Un mineur ne peut pas ouvrir une ligne ? Qu’à cela ne tienne, Niel junior appelle France Télécom et contrefait la signature de son père. La fin justifie les moyens pour le futur magnat des télécoms. Ce que l’on peut en déduire : même les meilleurs autodidactes ont besoin de contacter d’autres penseurs. Privilégiez toujours un bon contact plutôt qu’une idée développée en solo dans votre coin.
Soyez prêt à tout pour joindre la bonne personne. En 1987, il n’y avait pas Twitter pour interpeller le ministre et les hommes politiques n’étaient pas dans le bottin. Xavier Niel a alors 20 ans et armé d’un ordinateur « de moins de 1000 francs » et d’un peu de patience, il pirate avec l’aide d’un copain l’annuaire élyséen des radio-téléphones. Ce sont les grosses valises téléphoniques embarquées dans les voitures de fonction. Ainsi, Xavier Niel dispose des numéros directs de 84 personnalités ministérielles et présidentielles, dont celui de François Mitterrand himself. Quel enseignement en tirer ? Personne n’est injoignable ou inatteignable ; il suffit juste de faire marcher son imagination pour les atteindre.
A défaut de conseil, la nuit apporte… du traffic. Au milieu des années 1990, Xavier Niel possède une société de services Minitel, pour la plupart des sites coquins. Rappelons qu’à l’époque, l’utilisateur payait la durée de sa connexion et que l’argent récolté était ensuite partagé entre France Télécom et l’éditeur de la page consultée. Pour doper son chiffre d’affaires, le futur patron de Free échafaude une arnaque d’envergure : puisque les minitels de sociétés comme le Crédit Lyonnais ou de l’ANPE sont laissés allumés toute la nuit, Niel les connecte à ses propres services télématiques (ancêtres des sites web sur minitel). L’entourloupe lui vaudra une perquisition musclée et une garde à vue. Toutefois, les poursuites judiciaires n’aboutiront à rien. Enfin si : un pic de traffic inédit à une telle heure où même les télés n’émettaient plus…
La conclusion, c’est que nulle ne vous demande de flirter avec l’illégalité, mais n’oubliez pas que, en cas d’impasse, la solution vous tend peut être les bras dans un coin sombre où vous n’osiez pas regarder. C’est sans doute pour cette acuité que Xavier Niel est considéré comme un « visionnaire »…