
Signaler tout abus ou défaut pour que les municipalités ne puissent plus les ignorer, c’est le rôle de cette application collaborative déjà disponible dans une dizaine de villes. Rencontre avec Quentin, l'un des créateurs de Vigilo.
D’où est partie la volonté de lancer un tel outil ?
Vigilo est né l’année dernière à Montpellier suite au mouvement #JeSuisUnDesDeux. En réaction à une phrase de Philippe Saurel [président de la métropole et maire de Montpellier, ndlr], qui a dit qu’il ne ferait pas une piste cyclable « pour deux cyclistes ». Cela a redynamisé la communauté cycliste locale, il y a eu une grande manifestation autour de l’association Vélocité, les idées ont jailli à foison, dont cette application. Bruno et moi-même avons développé une première version, en open source, avant de la mettre en ligne en avril dernier.
Pouvez-vous nous présenter l’appli et son mode d’emploi ?
Vigilo permet aux cyclistes de signaler les difficultés rencontrées lors de leurs déplacement. Cela va du nid de poule, au feu rouge trop long, à la voiture garée sur la piste cyclable… Chaque “observation” est prise en photo directement sur le terrain ; elle est localisée et horodatée, et envoyée à notre base de donnée. Une équipe de 6 personnes va la modérer et l’anonymiser : on efface les plaques, les visages et tout ce qui peut identifier quelqu’un ou un véhicule sur les photos. Pour le moment, Vigilo existe en appli Android et en version web, en attendant la version iPhone qui est en attente de validation par Apple.
Que faites-vous de toutes ces « observations » ? Votre objectif est-il de contraindre les villes à bouger ?
Une mairie ne peut pas être partout, c’est pourquoi on offre des yeux. L’appli permet de lister des données factuelles que l’on met librement à disposition (en open data) des collectivités et associations qui pourront les exploiter et analyser afin d’axer des chantiers pour améliorer ces déplacements. Il y a une certaine pression, c’est sûr : les données sont publiques, les mairies ne pourront pas nier qu’il y a des soucis. Mais il n’y a pas de dimension militante. L’idée est que les mobilités actives puissent se déplacer en toute quiétude au lieu d’être bloquées quand les infrastructures ne sont pas là.
Combien avez-vous d’utilisateurs aujourd’hui ?
On a la particularité de ne pas faire d’inscription sur cette application, les utilisateurs sont anonymisés. On ne peut donc pas les estimer, mais ce n’est pas le but : l’objectif est d’avoir une “photo” du terrain en temps réel. Cependant on constate que Montpellier a enregistré 3500 observations en 6 mois, Châtillon/Vallée-Sud-Grand-Paris à peu près autant et Nantes 3100 en un mois. Certaines observations reviennent avec un nouveau usager – ce qui prouve que le problème n’a pas été résolu. Plus rarement, un usager tweete à la communauté que tel souci a été résolu. C’est d’ailleurs une fonctionnalité qu’on veut développer à terme.
C’est impressionnant comme Vigilo a été aussi rapidement reprise dans 10 villes alors que vous êtes des bénévoles et non une startup. D’où vient ce succès ?
Vigilo a été développé comme un projet open source, il y a des contributeurs de toute la France. Ensuite l’application a rapidement été diffusée par les réseaux sociaux puisqu’on peut publier ses observations sur Twitter. On a aussi eu le soutien de la Fédération des Usagers de la Bicyclette qui regroupe 300 associations. Son président, Olivier Schneider, est venu à Montpellier présenter l’application à la presse et le nombre d’observations a explosé. J’espère que notre application va jeter un regard sur les mobilités actives et ne plus les laisser être des faire-valoir négligés.
Envie de participer ? D’amener le service dans votre métropole ? Infos et téléchargement sur vigilo.city.