
Des généticiens ont réussi à cartographier l’ADN de cet étrange animal qu’est l’axolotl. Non seulement cette salamandre mexicaine a le plus grand génome connu mais elle peut se régénérer. Une chance pour nous soigner de la mort ?
Miracle mexicain. Avec son sourire béat et ses dreadlocks, cette petite salamandre amphibie de 30 centimètres semble se payer notre tête. Pourtant l’axolotl fascine les scientifiques depuis des décennies parce qu’elle est la seule espèce à pouvoir faire repousser ses membre coupés, réparer des os brisés et reconstruire des organes internes endommagés… Et cela comprend aussi ses yeux, son cerveau ou sa colonne vertébrale. C’est peu dire qu’on la jalouse.
Pour comprendre ce prodige, des scientifiques de Vienne, Dresde et Heidelberg ont travaillé à décoder le patrimoine génétique de la bestiole. Ils y sont enfin parvenus et le résultat dépasse les espérances.
Le génome le plus complexe au monde. Selon le séquençage réalisé par les chercheurs dirigés par Elly Tanaka, le génome de l’Ambystoma mexicanum (son nom de laboratoire) possède 32 milliards de paires de base, ce qui est gigantesque. Comparativement, celui de l’homme – déjà bien complexe – en contient 10 fois moins, et avec nettement moins de répétitions de séquences. Autre surprise, un gène mobilisé lors de la formation de nos tissus et nos organes, le PAX3, brille par son absence chez l’amphibien. En revanche, le gène PAX7 semble le remplacer. Une anomalie qui sonne comme la révélation du secret derrière la miraculeuse capacité soigneuse de la salamandre.
Vivre éternellement jeune et faire remarcher les tétraplégiques, voilà le cadeau caché dans l’ADN de l’axolotl.
Le chercheur Sergej Nowoshilow résume ainsi cette découverte : « Nous possédons désormais un plan pour accélérer nos recherches sur ce qui permet de faire repousser des structures aussi compliquées que des jambes. » Il s’agit en effet d’un sacré coup de pouce pour la médecine régénérative qui fonctionne aujourd’hui en créant artificiellement – et à grands coûts – des tissus vivants. Si l’on arrive à exploiter le PAX7, non seulement on pourrait soigner nombre de traumatismes mais aussi renverser toutes les destructions, qu’elles proviennent d’accidents comme de maladies, voire les dégénérescences de l’âge, donc rester éternellement jeune. On comprend la déclaration du Dr Tanaka : « Nous sommes aussi excités que si l’on venait de décoder le génome humain pour la première fois. »
Repousser la mort et les coûts médicaux. En gardant les pieds sur terre, les hôpitaux du monde entier ont à y gagner. La médecine régénérative héritée de l’axolotl permettrait de réduire le nombre de manipulations en labo et au bloc, donc de limiter les risques pour le patient et de faire des économies faramineuses. Une étude comptabilise 250 milliards de dollars par an dans le monde. Avant cela il faudra trouver comment introduire ce gène dans notre propre génome sans causer de divisions cellulaires qui, mal maîtrisées, dégénèrent souvent en cancer. Mais c’est déjà une nouvelle aventure pour nos chercheurs qui, pour le moment, sourient en retour au visage de l’axolotl.