
Le dérèglement climatique engendre des tempêtes chroniques qui noient les rues. Alors la capitale thaïlandaise s’organise.
La montée des eaux induite par le réchauffement mondial pose des problèmes aux pays côtiers, et plus encore à ceux qui n’ont pas d’altitude (comme les Pays-Bas) ou sont marécageux (tel le Vietnam). La Thaïlande est les deux à la fois. Au XIX siècle, on l’appelait la Venise de l’Asie, en référence à ses rues faites de canaux. L’expansion urbaine l’a contrainte à bétonner pour faciliter la mobilité et l’aménagement, ce qui a eu pour effet d’accentuer les inondations à chaque averse.
Incapable de construire une digue en béton, la municipalité a choisi de s’adapter aux orages. Ils ont lancé Porous City Network, une entreprise de promotion d’architectes paysagistes voulant s’attaquer au développement durable. Première concrétisation, la construction en 2017 du Chulalongkorn Centenary Park, un jardin de ville absorbant.
3,7 millions de litres épongés. Large de 4,45 hectares, ce parc contient des jardins à étage, une colline artificielle et une longue lande de verdure en pente douce, favorables à l’écoulement. Lors des épisodes orageux, l’eau rejoint trois grands réservoirs souterrains. Le stockage peut atteindre un volume de 3,7 millions de litres de pluie qui seront réutilisées pour l’arrosage des espaces publics l’été venu.
Un petit bassin de rétention suffit pour les averses. Des vélos fixes sont installés au-dessus : en pédalant, on pompe de l’oxygène dans l’eau, ce qui évite la propagation des algues qui boucheraient le bassin. Pour les grandes tempêtes, le jardin concave au pied de la pente peut contenir plus de 378 000 litres d’eau. Les précipitations s’écoulent à travers les terrains filtrants et une série d’étangs.
Absorber le dérèglement climatique. « La pluie inonde le jardin pluvial plutôt que la rue », explique l’architecte Kotchakorn Voraakhom qui a conçu le parc. En plus d’éponger et accumuler de l’eau, le parc de Chulalongkorn compense l’effet d’îlot thermique durant les canicules. « Avec cette construction, le but n’est pas de se débarrasser des inondations, explique M. Voraakhom. Il s’agit de vivre avec elles. »
Versant social, les habitations sont prévues autour et point de vue mobilité, une route a été convertie en piste cyclable. À terme, Bangkok envisage de remanier son réseau d’égouts actuellement saturé et encombré de déchets plastiques, de libérer des espaces verts et peut-être de remettre des canaux. En attendant, un second parc absorbant est en chantier. Ses travaux seront terminés en 2019.