Noir intégral. Depuis près de trente ans, Ben Felter ne voit plus rien. Lui qui aime les motos et la mécanique depuis sa prime adolescence a connu son premier accident à l’occasion duquel des médecins ont diagnostiqué une rétinite pigmentaire. À la vingtaine, cette maladie dégénérative oculaire a d’abord grignoté sa vision nocturne. Puis diurne. Avant de laisser Ben Felter complètement aveugle. Mais bien qu’il évolue dans une nuit complète et perpétuelle, cet Australien a décidé de ne pas changer de vie et continue la moto.

Il est même devenu le directeur du club sportif pour aveugle de Sidney puis coordinateur de l’Agence sportive pour les handicapés de Nouvelle-Galles du Sud. Bien sûr, son kif n’est pas de gérer des dossiers. Lui qui souhaitait s’engager dans la marine et qui cumule les médailles en aviron et en cricket, rêvait d’établir un record. Pour montrer qu’avec un handicap ou non, chacun est libre d’aller où il souhaite.

Poignée en coin. Alors en 2017, il a organisé son exploit. Aux commandes d’une Yamaha R1, il a réussi une course parfaite dans le désert de Lake Gairdner. Une ligne droite dans cet espace dénué d’obstacle, seulement radioguidé par son partenaire qui le suivait sur une seconde moto. Un complice qui n’est pas un simple figurant puisqu’il s’agit du champion de course Kevin Magee. Le résultat appartient désormais à l’histoire : un record de 251,45 km/h.

Décidé à prouver que rien n’est insurmontable, Felter n’allait pas s’arrêter là. Il a donc tenté cette année de battre son propre record et de pulvériser les compteurs. En selle de sa Kawasaki ZX-10R, capable d’une vitesse théorique de 290 km/h, il réussi l’exploit d’atteindre 266 km/h. Concentration, réactivité millimétrée, le champion a la victoire humble puisqu’il posera après coup pour son sponsor avec chien et canne blanche, sourire en coin. On peut être aveugle et aimer les clins d’œil…

Plus qu’une mention dans un livre, c’est évidemment une démonstration de force (mentale) qui prouve que l’on peut s’affranchir de tout et que rien n’est impossible à qui sait ne pas dévier de ses rêves.