
Grâce à un programme unique en Europe, la Finlande a divisé par deux le nombre de SDF en 20 ans. Quelques centaines de kilomètres plus bas, en France, les politiques hésitent encore à aller aussi loin…
Logement d’abord. “La première bataille, c’est de loger tout le monde dignement. Je ne veux plus, d’ici la fin de l’année, avoir des femmes et des hommes dans les rues, dans les bois ou perdus.” À qui doit-on cette promesse ? François Hollande ? Raté. C’est Emmanuel Macron, en juillet 2017, fraichement élu par les Français, qui promet un toit à tous avant la fin de l’année. La declaration, aussi forte que décevante, n’a pas été suivie d’actes concrets ; la “faute” selon le gouvernement, aux afflux migratoires trop importants sur le sol français. À l’inverse, en Finlande, un programme beaucoup moins mediatisé a permis de réaliser ce miracle sur lequel tant de présidents de la République se sont cassés les dents : Housing First (“le logement d’abord”), une mesure politique et sociale qui a permis de lutter efficacement contre l’exclusion.
« Ce principe a permis de sortir de la rue les SDF les plus exposés, ceux qui souffraient de maladies mentales ou d’addictions, en les convainquant qu’ils étaient capables, eux aussi, de vivre en appartement. » (Juha Kaakinen, directeur de Y-Foundation)
Quand la température guide la politique. Réchauffement climatique ou pas, les hivers sont toujours froids en Finlande (les -20°C sont fréquents), et c’est peut-être l’une des raisons (avec la faible densité démographique du pays : 5,5 millions d’habitants) qui a poussé les dirigeants, en pleine crise des subprimes, à investir pour les mal-logés. La conséquence est donc Housing First, une politique visant à abriter tous les SDF par l’octroi d’appartements ou de maisons avec, à la clef, un résultat époustouflant : entre 1987 et 2016, le nombre de sans-abri est passé de 18 000 à 6700.
Comme le rappelle Libération, la Finlande compte deux fois moins de SDF que la France. Mais même à son échelle, le résultat est éloquent : 50% de SDF en moins dans les rues grâce à 3700 logements construits en une décennie avec l’aide de Y-Foundation, le plus grand bailleur social finlandais.
Quand solidarité rime avec économies. Souvent taxée « de gauche », la mesure consistant à réduire le nombre de SDF possède également des vertus économiques (« de droite ») puisque le programme Housing First semble prouver qu’on peut aider son prochain en dépensant moins. Avec un investissement initial de 240 millions d’euros, Housing First a permis au gouvernement d’économiser 14 000 € par an et par tête selon le ministère du Logement, via l’arrêt de prises en charge et autres mesures sociales inefficaces.
En France, selon l’INSEE (chiffres de 2013), 141 500 personnes vivraient sans domicile fixe ; le chiffre étant évidemment une estimation à revoir (hélas) à la hausse. La dernière personne politique à avoir exprimé l’envie d’endiguer le « sans-abrisme » se nomme Valérie Pécresse, elle qui déclarait fin mai vouloir construire des maisons solidaires pour mettre à l’abri les SDF du métro. Reste à voir si cette fois la promesse sera suivie d’actions. N’oublions pas que voilà dix ans, l’ancien responsable de son parti politique avait promis «qu’en deux ans plus personne ne [serait] obligé de dormir sur le trottoir ». C’était Nicolas Sarkozy.