
Pour contrer la spéculation, la société Étic réhabilite les friches en bureaux écolos et les met à disposition des projets innovants. À la commande de ce double combat, Cécile Galoselva invente les incubateurs privés et humanistes.
Le château ambulant. Le château de Nanterre n’a pas toujours eu ce surnom. Son pavillon de 2000 m² et son parc de 5000 m² étaient dédiés à la fabrication d’alcool de menthe et de dentifrices du Dr Pierre entre 1900 et 1940. Après quelques années en friche, le site prestigieux est désormais passé entre les mains d’Étic, société foncière qui lui a confié une nouvelle mission de sauvetage : accueillir associations et startups qui brillent par leur impact environnemental et social.
« On aime que dans un même centre il y ait deux ou trois thématiques, parce qu’on est pour le décloisonnement. Le fait que des structures de secteurs différents se croisent, ça leur permet d’être plus innovantes et de s’enrichir les unes les autres », explique Cécile Galoselva, PDG d’Étic.
Good à tous les étages. Au rez-de-chaussée s’étendent les cuisines partagées de l’incubateur culinaire United Kitchens et le restaurant d’alimentation durable pour tous Foodentropie. Les jardins, où poussait autrefois la menthe poivrée, sont aujourd’hui des potagers thérapeutiques de l’association ENDAT, qui vient en aide aux personnes souffrant de troubles du comportement alimentaire. D’autres structures, axées sur la transition énergétique et sociale, devraient rejoindre l’association Les petits frères des pauvres dans les bureaux de l’étage.
Élever le niveau en abaissant les coûts. Pour leur offrir un loyer abordable et adapté à leurs besoins, Étic enfile plusieurs casquettes : « On est à la fois gestionnaires des lieux, et foncière, et on a énormément piloté les travaux. » La réduction des coûts se fait tout au long du projet : « On essaie d’acheter un chouia en dessous du prix du marché. Ensuite on utilise des techniques de rénovation qui vont loin d’un point de vue environnemental mais ne coûtent pas forcément plus cher. »
Et dans la gestion, quid des marges ? « On a des marges plus basses que le marché, précise Cécile Galoselva, les financiers demandent un retour sur investissement plus bas que la moyenne, et l’écart salarial d’Etic est de 1 à 3. »
Investir dans l’après. Le frein majeur ? L’achat du bien puisque, dans le domaine privé les propriétaires préfèrent vendre au plus offrant. Une autre solution, comme à Nanterre ou Montreuil, aider les collectivités qui peinent à héberger les associations, et donc s’engager sur l’activité : « Dans l’acte de vente de l’ancienne usine de Montreuil il est écrit que si jamais on se met à faire des lofts ou des choses spéculatives, on doit rembourser la différence de la décote qu’on a eue. C’est tout à fait normal ; c’est même nous qui l’avons proposé. »
Rénover = diviser par 5 les consommations. Un engagement holistique qui se retrouve dans leur engagement écolo : « Quand on gère un bâtiment, on le fait consommer 5 à 10 fois moins que la moyenne en France. Ça comprend l’énergie, les déchets, les transports d’eau… On conseille même aux restos d’avoir une option végétarienne parce qu’on sait l’impact carbone de la consommation de viande. »
Qui paye ? Toutes ces améliorations sont financées par une myriade d’acteurs : particuliers, clubs de business angels du développement durable, fonds solidaires, épargne salariale solidaire… Un danger ? Non, une autre vision de la finance : « Nos bureaux répondent à la spéculation immobilière et l’action Etic, conclut Cécile Galoselva, c’est d’être une alternative à la spéculation financière. »