Mon carburant est un robinet. Si vous étiez attentifs en cours de physique chimie au collège, alors vous savez que la molécule d’eau est composée de deux atomes d’hydrogène et d’un atome d’oxygène. Si vous avez réellement suivi les cours, alors vous êtes également au courant que l’on peut décomposer l’eau en utilisant un courant électrique. Ce phénomène, l’électrolyse, permet de produire de l’hydrogène gazeux sans dégager de CO2. Et si l’électricité utilisée pour l’électrolyse est vert (c’est-à-dire qu’elle a été produite avec des énergies renouvelables), alors l’hydrogène est produit sans aucune émission de gaz à effet de serre.

En 2015, un Brésilien a trafiqué dans son garage de São Paulo une vieille moto Honda de 1993 pour faire en sorte qu’elle puisse rouler avec de l’eau, en utilisant donc la méthode de l’électrolyse décrite ci-dessus. L’électricité est fournie par une ancienne batterie de voiture (qu’il faut donc recharger) et selon Ricardo Azevedo, un litre d’eau lui permet de rouler 500 kilomètres.

On peut même la boire. Pour montrer que sa moto fonctionne sans pétrole, Ricardo Azevedo n’a pas hésité, devant les caméras, à boire la même eau qu’il utilise pour faire carburer sa moto. D’après le Brésilien, même l’eau polluée récupérée dans une rivière ou dans un fleuve peut être utilisée pour rouler. Ceci étant dit, l’inventeur a montré pour la première fois sa création en 2015. Depuis, Ricardo n’a pas donné de nouvelles concernant de nouveaux essais. Et l’autonomie de 500 kilomètres avec un seul litre d’eau n’a jamais été confirmée par d’autres personnes non plus.

Mais si cela fonctionne, pourquoi tous les véhicules ne roulent-ils pas à l’eau ? Si on veut décomposer l’eau pour créer de l’hydrogène, il faut beaucoup d’électricité, comme l’explique Laurent Castaignède, ingénieur Conseil Climat-Air-Energie, à Radio France. « Si on fait tourner une centrale au charbon pour produire cette énergie, qu’on décompose la molécule d’eau pour obtenir de l’hydrogène et faire rouler une voiture, le bilan global est catastrophique », poursuit l’ingénieur.

Une solution de masse ? Lors d’une autre interview pour Ouest France, l’ingénieur explique aussi que « l’alternative constituée par l’électrolyse de l’eau n’est valable que si l’électricité utilisée pour cela est propre. Mais pour l’instant, la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables est loin d’être disponible à cette fin puisqu’elle peine à substituer la production actuelle d’électricité fossile. »

En résumé, si la méthode de Ricardo fonctionne, elle est, in fine, peu écologique. Et donc pas adaptable ni souhaitable à l’échelle industrielle. Car au-delà du fait qu’il utilise une batterie de voiture pour faire fonctionner une moto, il faudrait que les énergies renouvelables soient la principale source d’énergie mondiale (et non le charbon, le pétrole ou le nucléaire). On est donc encore très, très loin, d’ouvrir le robinet pour faire le plein.