
À la fin du 19e siècle, la mobilité a connu des bouleversements sidérants et pas si éloignés que ça des révolutions actuelles. Du transport à chevaux, on est passé à l'automobile, au tramway, au métro... Dans cette course à l'innovation, les records de vitesse n'ont pas tardé à apparaître, avec le moteur électrique en tête. Eh oui.
France vs Belgique. 1899. Deux gentlemen se livrent une bataille : celle pour le titre de l’homme le plus rapide du monde. À notre gauche, il y a le comte français Gaston de Chasseloup-Laubat, 32 ans, qui vient d’établir le tout premier record de vitesse terrestre avec un véhicule sur roues en atteignant les 63 km/h. À notre droite, se trouve son challenger, Camille Jenatzy, un ingénieur belge qu’on surnomme le “Diable Rouge” à cause de sa barbe rousse.
Le 17 janvier, Jenatzy réussit à monter à 66 km/h. Quelques heures plus tard, le comte récupère son record en atteignant les 70 km/h. La tension entre les deux hommes est grande. La particularité de ce duel ? Les voitures qu’ils conduisent l’un et l’autre sont électriques. Et le record est finalement fixé par Camille Jenatzy le 29 avril 1899 sur une route des Yvelines. Il devient le premier pilote à franchir la barre hautement symbolique des 100 km/h. Ce jour-là, le Belge conduit un prototype électrique qu’il a affectueusement nommé la “Jamais Contente” ; soit un véhicule en forme de torpille de près de 4 mètres de longueur qu’il a construit dans un alliage d’aluminium et de magnésium laminé. La propulsion a été rendue possible grâce à la conception de deux moteurs électriques d’une puissance de 50 kW, soit environ 68 chevaux. Les batteries représentaient la moitié du poids total d’1,5 tonnes.

Cette barre des 100 km/h ne sera de nouveau franchie que trois ans plus tard, le 13 avril 1902, par Léon Serpollet au volant d’une voiture appelée “L’Œuf de Pâques” qui pulvérise de près de 15 km/h le précédent record. Cette fois-ci, l’énergie employée est la vapeur. Comme quoi, l’hégémonie du pétrole ne date pas de la nuit des temps. Et en attendant que son règne prenne définitivement fin, on peut toujours aller admirer les courbes de la “Jamais Contente” au Musée de la voiture de Compiègne.