
Vous devriez vous dépêcher d’apprendre les emoji, car demain les émoticônes pourraient bien former un langage à part entière, notamment au boulot. C’est pourquoi il s’agirait de se former, sous peine de finir paumé.
Le monde pas si secret des Emoji. Keith Broni mène un train de vie plutôt classique. Tous les matins, le jeune Londonien se lève, prend son ☕ et au bureau. Si cette phrase vous semble cryptique, cela signifie que Broni a du pain sur la planche et que son métier ne vaut pas les moqueries qui lui ont été attribuées sur Twitter lors de son apparition sur la BBC en août 2017. De fait, l’homme est traducteur d’emoji professionnel pour le compte de la société Today Translations.
Parmi ses missions figurent la réalisation d’un guide emoji, des activités de conseils sur leurs usages et l’analyse de l’utilisation des smileys dans des contextes spécifiques. La légende ne dit en revanche pas s’il a réussi à déchiffrer le tweet d’Andy Murray.
https://twitter.com/andy_murray/status/586811114744320000?ref_src=twsrc%5Etfw&ref_url=http%3A%2F%2Fwww.lemonde.fr%2Fpixels%2Farticle%2F2016%2F03%2F15%2Fles-emoji-constituent-ils-un-langage-a-part-entiere_4883318_4408996.html
Miroir culturel. La linguiste Gretchen McCulloch et Ben Medlock, cofondateurs d’une application clavier pour smartphones, indiquaient en 2016 que 4,6% des messages que nous échangeons en ligne contiennent un emoji ou plus. Et ce taux ne fait qu’augmenter, notamment grâce à Facebook et ses « smileys de réaction », qui servent à jauger à eux seuls l’avis d’une communauté — et donc, pour les entreprises, d’avoir un retour sur investissement qu’il faudrait comprendre comme il se doit. Mais c’est justement ici que l’emoji bloque encore. Comme l’explique McCulloch : « Même s’ils ressemblent à des petits dessins, les hiéroglyphes, eux, contiennent de l’abstraction. Contrairement aux emoji. »
🙂 Cette notion d’abstraction qu’évoque McCulloch commence néanmoins à être intégrée dans l’un des « contextes spécifiques » qu’étudie Broni : le boulot. Les résultats d’une étude publiée le 14 août par des chercheurs de l’université Ben Gourion du Néguev en Israël font part du double-sens avéré de l’emoji le plus courant : le sourire. Elle indique que son usage, dans un mail pro, par exemple, n’accentue pas la notion de chaleur et de courtoisie mais dessert plutôt son utilisateur.
Pour le prouver, ils ont soumis une série de mails à 549 volontaires, dont certains contenaient des smileys. Le verdict fut sans appel : les mails ponctués d’un smiley « sourire » ont été jugés comme envoyés par une personne peu compétente, alors que tout partait certainement d’une tentative d’amabilité. D’où la nécessité de se former à un usage conscient, correct mais aussi « abstrait » du langage emoji, sous peine de se retrouver dans ce genre de situation.